vendredi 18 mai 2012

La ferme des animaux


Alors comme ça, le changement c’est maintenant ? Il faut laisser la place aux jeunes, apprécier et admirer la beauté juvénile turgescente d’une bande de petits merdeux ? Magnifier leur vigueur débordante et leur poisseuse immaturité puérile ? Soit. Je n’ai jamais eu l’âme d’un résistant mais j’ai toujours cultivé une belle nature de fayot. 
Je peux le faire. Je vais le faire avec toute la détermination éthylique d’un douanier méridional. Avec, bien sur, un zeste du poseur parisien incorrigible que je suis (je te le dit à toi petit lecteur dur mais néanmoins ô combien compatissant devant lequel je comparais à chaque fois dans mes oripeaux de musicien déçu et de critique raté). Mais cessons de parler de moi. 


Que le supplice commence, je vais vous parler d’un groupe de jeunes. Pas les jeunes de 32 ans des productions de France Télévisions, non. Des jeunes, des vrais, de ceux qui se battent jusqu’au sang pour un reste de Mister Freeze, pour une place sur un banc, le baiser d’une fille. Des jeunes, dont la créativité s’épanouit dans l’ennui. Dont la pression urbaine à froid donne une pâte encore plus fraîche que le pot de Bridélice 0% refroidi par le chef de rayon nazi de votre Ecomarché-G20-Franprix-Monoprix le plus proche.
Tu l’auras compris Mézigue, ce soir je vais te parler d’un vrai groupe de jeunes, certificat de naissance à l’appui (l’ensemble du combo a moins de 18 ans de moyenne d’âge). Il a fallut chercher cette bande de délinquants juvéniles dans une région séminale. 
Un endroit du globe où les mômes sont trempés dans le rock haute énergie depuis leur petite enfance, dopés dès la naissance comme des vaches aux hormones (ou des athlètes d’Allemagne de l’est). Cet endroit, c’est celui du triangle d’or de la distorsion. Constellé d’usines à l’abandon et de trailers parks survivant de petits trafics afin de financer les descentes hebdomadaires au mall, entre un plat chez Chuck E Cheese et les emplettes au Dollar Tree
Cet endroit, c’est la bien nommée ceinture de rouille, la « rust belt ». Une sorte de Tourcoing meets Amiens et Charleroi américaine. A l’extrémité ouest du triangle maudit Chicago-Detroit-Cleveland vit Elmhurst. Tranquille bourgade de la banlieue interminable de Chicago d’où proviennent The Orwells. Un groupe de jeunes touillant un rock indé rugueux et plutôt tendu. Les ingrédients sont présents au rendez-vous : une belle petite énergie et un son étonnamment mature, bien que peu original, mais américain, sale et dégoutant à souhait. 


L’album dont je vais vous parler est le premier livré par cette formation (le groupe n’est d’ailleurs pas encore signé, ce qui ne saurait tarder). L’effort s’appelle « Remember When », et c’est un fort joli premier album, costaud et sobrement produit. Il s’ouvre sur une ballade électrique vaguement mélancolique. « Lays At Rest » débute dans des entrelacs de guitares gratouillées introduisant une rythmique aussi kitsch que simpliste de tambourins et claves. La chanson raconte les tourments d’un adolescent psychotiques d’un jeune homme venant d’abattre une fille d’une balle dans la tête. Sous ses pieds s’ouvre un gouffre, celui de la culpabilité, de l’erreur et de l’angoisse, et, déjà trop vieilli, cet adolescent ne peut que se souvenir. 
La deuxième piste est la plus rock’n’roll de tout l’album. C’est un pastiche punk d’un groupe souhaitant faire la synthèse entre les Stooges et les Artic Monkeys. Le grand écart de l’énergie, entre USA et Royaume Uni. Un filtre de voix tout simplement pompée sur Iggy pop, un refrain aussi crétin que ceux des Animals de la grande époque « la la la la lalalalala la la la la la lalalalala etc… », un riff de guitare taillé dans la masse qui vous tombe sur le coin de la gueule comme une embuscade du Vietcong. Cette chanson méchante laissera l’auditeur comme après une cuite américaine : souffreteux au Taco Bell du coin en essayant de concilier l’aigreur de 10 jaeger bombs avec la hot chily sauce des burritos with extra cheese. 
Notre bande de petits rigolos laisse ensuite retomber la pression avec « Halloween All Year ». Un morceau transpirant la nostalgie, les regrets, le tout donnant faisant ressentir un mal être quasi-emo. Avec une voix plus déprimante que jamais, un brave garçon nous relate ses cauchemars dans lesquels ils tentent de trucider un mort vivant qui le suit chaque fois qu’il ouvre les yeux. Les cymbales crashs bousillent le morceau, et la guitare plaintive à la limite de la rupture semble s’évanouir dans un dernier larsen. 
La chanson suivante à tout bonnement volé son intro sur « Slave Girl » des Goo Goo Dolls (ce qui est bien sur une référence validée par la rédaction de ce modeste blog). Les guitares sont plus sautillantes et la mélodie nettement plus joviale, disposant d’assez d’ampleur pour évoquer un peu le swinging London. « All The Cool Kids » brosse le portrait acide d’une jeunesse hédoniste sombrant dans la luxure et la défonce « You’d rather stay high than say hi ». Le morceau durcit pour finir dans des derniers échos de guitares tripantes se perdant dans la nuit du midwest. La chanson suivante renoue avec la lignée US la plus pure. Une écriture que d’aucuns qualifieront de Newcombienne (ohlala), et des riffs de guitares directement pompés sur ceux du Brian Jonestown Massacre. Le tout délivré dans un packaging un peu plus juvénile et plus nerveux, qui n’est pas sans rappeler l’ambiance délétère et garage des Flamin’ Groovies. Le mélange fait largement la blague avec une voix à mi chemin entre un Iggy Pop cool et un Jack white un peu en colère. 
Le groupe appuie à nouveau sur le champignon avec la piste suiranve « Hallway Homicide » où le métissage Rock US/UK du groupe est encore plus nettement mis au jour. Une section basse/batterie digne des Ramones ouvre la route à des guitares aigrelettes couinant à toute allure comme celles des Libertines de la grande époque. Ce groupe est bel est bien une synthèse (poke au président, léchage de boule oblige mais je retournerai ma veste après les cent jours comme tout le monde héhé). 


Le groupe d’Elmhurst continue à nous faire explorer les atermoiements sentimentaux adolescents avec « In My Bed ». 
En effet, après l’ennui, la violence, les visions psychotiques, l’amour a enfin voix au chapitre. Pas de la manière la plus fun certes car il s’agit d’une chanson de rupture. Les plus douloureuses, celles murmurées à demi mots en utilisant les moyens et les médiums les plus déroutants. Il s’agit ici d’une conversation sur l’oreiller. Ce doux instant, cette délicate conversation se mue en moment de rupture tragiquement déroutant. « C’est la vie, parfois faite de mensonges et de faux semblants », semblent nous dire ces rockers désabusés dont les voix se répondent. « Never Ever », la chanson d’après continue dans la veine de la mélancolie. Il est question ici de temps qui passe, de la peur devant l’âge et du changement. La basse fuzzy, les chœurs et la saturation improbable produisent un assemblage évoquant les Replacements. L’adolescence, à la fois si belle et si douloureuse, passant si vite et se termine dans un fracas : la maturité, une petite mort qui effraye diablement nos amis et les déprime d’avance.
Un nouvel instrument fait brièvement son entrée afin de soutenir les mélodies de guitares, l’orgue. 
Ce dernier sert de prétexte afin d’amorcer le triturage d’un vieux thème bluesy, celui de la fuite de la bien aimée quittant sa ville merdique, laissant son amoureux sur les carreaux. Le refrain « My old baby’s got me down » servant de motto à “Like No One Else”. Le tempo continue de se poser sur “Ancient Egypt”. La voix nettement moins filtrée rappelle les Strokes et permet des modulations intéressantes avec les guitares qui deviennent passionnantes lorsque nos ados de l’Illinois se laissent aller à de petites fantaisies. Le morceau s’efface progressivement sur un fade out rappelant les beautés nocturnes et vénéneuses des prostituées dans les rues la nuit tombée. L’album se solde par une dernière chanson déprimante, portée par des guitares gratouillées comme des mandolines (surement un hommage aux origines italiennes du chanteur Mario Cuomo) écrasant la chanson de toute leur acidité sonore. Une dernière piste que vous pourrez donc zapper sans trop de remords.


Et bien voilà, les élections sont terminées. Le nouveau président investi, mon dû est payé. Mon allégeance est consommée et mon blanc-seing total. J’espère juste que cette séance d’auto flagellation democratico-republicaine absurde aura pu vous faire découvrir un groupe  intéressant dont l’album est disponible gratuitement ici. Je tenterais de faire preuve de plus de goût et de plus de style dans la prochaine chronique. Il n’est évidemment pas sûr que je réussisse. D’ici là portez vous bien. 

samedi 31 décembre 2011

Nicolas, 24 , UNDER-PAID UNDER-SEXED AND UNDER COMPLETE CONTROL

Alors, on me croyait mort hein? Huits longs mois d’absence, ça semble encore plus long quand on l’écrit. Dégagé, terminé, liquidé le vieux Nico. Vous me pensiez vidé, fini, agrippé au comptoir d’un tripot de Pukhet, loin de tout ce bordel. Une fesse rebondie de travelot sous la main, à essuyer mon propre vomi sur mes derniers baths. Le tout sous l’œil incrédule de sa majesté Bhumibol Adulyadej, roi de Thailande, ni plus, ni moins.
Ou peut-être même encore pire : parti bloguer ailleurs, sans un mot, sans un au-revoir convenable, sans un adieu humide et rétrospectivement gênant. Parti comme il était venu le connard, une main devant, une main derrière, avec ses phrases malignes et ses simagrées, de toute façon, ce pauvre type ne trompait personne.
Et bien détrompez-vous, c’est bien connu, les meilleurs partent les premiers et les tâches restent. Elles s’agrippent, elles s’accrochent. Même après huit mois d’apnée, la houle les rejette des bouches d’égout, et elles finissent toujours par échouer sur vos godasses. Surprised to see me?

Ce genre de personnages méprisable va vous sortir avec aplomb une phrase coquette, joliment tournée pour vous demander pardon. Pour vous dire qu’ils sont désolés, qu’ils ne voulaient pas, que la vie est une chienne et que chaque seconde sans vous a été un déchirement. Autant vous dire que je compte, vous épargner ces salamalecs.

D’ailleurs, tout ce temps j’ai fait des trucs, mais qui n’ont intéressé que moi et ma petite personne, négligeant par la même occasion vous, mes fidèles lecteurs et bons amis de l’internet.
J’ai essayé de gagner ma croûte, essayé de sortir mon pays de l’ornière économique (avec le succès que l’on connait).
J’ai appris très peu de choses utiles et belles ces derniers temps à vrai dire. J’ai juste lu Nimier et Blondin assez pour que leur talent et leur panache me foutent les glandes. Pour que leurs phrases à la fois si belles et si sèches vous laissent étourdi comme la balle qui vous loupe. Interdit et la main sur la tempe, tiède de sang, essayant benoitement de comprendre (je pense que c’est aussi le genre de truc que doivent ressentir les emos et les psychotiques au quotidien). Oui, vous l’avez compris, ce sera cela mon projet, la coller à ces cadavres, leur prouver que les vivants peuvent être aussi bons qu’eux et que de parler de disque est un alibi aussi légitime que celui de parler vélo.

Mais s’il vous plait, parlons de vous dans tout ça. C’est con, mais je ne pouvais pas vous laisser tomber. Je me devais de rester votre fidèle et loyal compagnon, le chroniqueur zélé, sincère et maladroit de cette époque fantastique. Après une année 2011 chargée, riche en catastrophes naturelles, révolutions et cataclysmes nucléaires, je me devais, d’être à vos côté, le regard trouble et la bouteille de Whisky déformant mes poches de veste.
La  récession nous chatouillant nos orteils de petits bourgeois bien nourris, des bêtises restent à dire.  Cela tombe bien, un album attend sa review et je ne pouvais pas vous la balancer comme ça, à sec, comme un viol de prison. Il me fallait une petite remise en jambe après cette inactivité et cet article proprement inutile est parfait.

Non, en fait il ne sera pas si inutile que ça, car j’en profite pour vous souhaiter une bone année 2012, en tout cas meilleure que 2011.
On  attaquera cette année comme on a commencé la dernière, le flingue sur la tempe, le doigt sur la gachette, mais ensemble, et ça, ça change tout. A très vite.

samedi 7 mai 2011

Driving lesson

Nico, don’t you know how to drive ?
No, I don’t. Why? Because I fucking hate cars, I fucking hate traffic lights, I fucking hate crossroads, I fucking hate clutches, I fucking hate roundabouts, I fucking hate road signs, I fucking hate gas stations, I fucking hate highways, I fucking hate patronizing driving teachers, I fucking hate “pschtt pschtt cleanin’up my windshield with a sip of spray cos’ ya can’t see folks driving your way cos’ ya have dead insects or bird poop on ya windshield ya”, I fucking hate dickheads drivers that cut roads and don’t give a shit about it, basically negating your right to live as a human being.


That is the problem. The road is not made for humans to live decently. It’s for cars. Period.
The road is basically made for douchebags fighting over the size of their dick in epic duels of morroness and brutal stupidity. 
They don’t give a fuck about who you are, about what you do, they’re just slapping in your learner face the big fat cock of injustice in a tired honking sound of excitement and cruelty. 
I’m not usually scared of people when I walk in the streets, because actually, you have a very small risk of actually DYING when bumping into someone. 
It’s not the same when you’re driving because basically any idiot who don’t even know how to read can kill you, and it will be his fault. And you, well you’ll be sorry, because you’ll be dead.


The teacher is not your friend.
I used to like my driving teachers because I admired their raw exhalation of mannish virility. You know this complex mix of coffee and cigarette breath, this little twinge of old sweat when it’s hot outside, the stains of diesel on their shoes… 
I respected their not-giving a fuck attitude with girls, whistling at skirts and following asses like if it was the brand new Maseratti Quattoporte (“Oh what, you didn’t see it yet? how gay you must be son?”). 
The reason I’m also slowly starting to hate them is how they see everything as a big deal. 
For instance when you pull your car over to park : “What ?!? You didn’t double checked the dead angle when you were parking your car in this lousy abandoned by all parking lot? You must be retarded!”
 To them, everything is a matter of one-second-do-it-or-not-or-die-like-a-fucking-loser-situation and never let you go with it. You’re just trying to do your job at the driving wheel as well as you can and it’s not enough. 
You’re an upstanding citizen working hard and contributing to society as a whole and they treat you like shit. 
Don’t forget that in the meantime, you have in mind the sorry ass example of your relatives, family and friends driving stoned to death or passably drunk, something that you’ll never do because you’re a caring and decent well educated person.  
I could list you a whole bunch of other examples when this guy sitting lazily at your right wants you to behave like fucking Robocop and each time you don’t makes you feel deeply sorry about it.


Mental Mayhem.
Word after word, mistake after mistake the anger grows slowly when watching this swarm of tall four graders fucking around with your nerves. 
Your primal hate grows and goes away in mental spurts that you try to hide in the back of your mind (when concentrating on which way to go on this damn twisted road, designed by a sick bastard that was a local because everybody knows here that you have to go right-right-left, watch the double traffic lights arrows and make a pause on a white line as thin as my ball's skin and wait a little while because otherwise, a train can slice the car in two. And then turn left. It’s as simple as that). 


And the guy goes “Open your eyes! Are your sleeping or what?”


And you’re like “I’ve got my eyes wide opened you fucker, see that truck coming?”


*HORN SOUND/FLASH/THUNDER/RAGGED NOISE OF TORN METAL AND TWISTED PLASTIC/BLACKOUT*


Stunning quiet. Yes. You’re better off dead.

dimanche 20 mars 2011

Finding the last man standing

Alors comme ça 2011 sera donc l’année de la vérité, celle des braves. Celle où l’on fait le tri. Celle où l’on gardera le minimum vital. Ce sera Europe 1 sans cette burne de Fogiel. Ce sera Dior sans John Galliano reparti planter des bégonias en désintox. Ce sera le Japon sans âme qui vive, quand le dernier samouraï ravalera sa thyroïde comme un gros sashimi au plutonium encore frétillant. Plus de patrie du jeu vidéo. Disparue tel un mirage sublime englouti dans une grande faille au radium. Comme si la terre toute entière nous disait d’aller nous faire voir en détruisant le pays de Ken le survivant. Si ce dernier n’était pas Ken, alors qui ?
 Qui seraient les derniers malades assez fous pour faire un dernier bras d’honneur à tous les éléments. Qui resterait comme Khadafi le doigt sur la gâchette de son flingue plaqué or et le nez dans le saladier de coke jusqu'à ce que la grande déferlante salée du destin lui lèche les orteils ? J’ai cherché dans ma collection d’album et la réponse était simple.
Elle me provoquait sur la pile de CDs par le biais d’un chiotte tout droit sorti d’un boui-boui de la nouvelles Orléans. Qui pouvait se sortir vivant de là à part des démons clochards vibrionnant. Ces enfoirés de Stones, déjà cramés dix fois, des blagues vivantes, des running gags humains pas mécontents d’être là.

La chose était sure : ces enfoirés de Stones seraient là jusqu’à la fin des temps, jusqu’à la chute finale dans la grande étendue d’eau. Le déluge. La fin biblique par excellence qu’allait rencontrer Brian Jones dans une cinquantaine de mètres cubes d’eau chlorée peu après l’enregistrement laborieux de cet album. Le petit bain avant le grand, avec bagnoles flottantes et bateaux en flammes de rigueur. Oui c’est sur, ça, se serait une fin stonienne. Et le dernier Jukebox jouera les dernières mesures de Beggar’s Banquet échoué sur le grand toit métallique du Auchan de Fontenay sous Bois. Pourtant tout le monde savait que c’étaient eux les démons, ils l’avaient même clamé. « Simpathy for the Devil » Où l’on marche sur les traces de la bande des connards favoris de Satan sur une ligne de tambours africains, et de congas agrémentés de pianos. 
On imagine très bien cet enfoiré de Mick, trahissant Jesus, traversant les steppes sèches de Russie, accoudé sur le blindage brulant d’un panzer, flinguant les Kennedys les uns après les autres. Ces chœurs de Woo hoo légers et provocants ponctués de quelques échardes de riff le savaient et se moquaient de leurs victimes passées et à venir. « I’ve got No Expectations » prend le revers du problème avec philosophie. 
Le Bottleneck trainant prend d’ores et déjà la mesure de la chute. Rien ne vaut le coup, la beauté, l’amour et l’honnêteté sont des valeurs bien trop complexes et trop humaines. Il faut s’en débarrasser, car dans une situation difficile, elles ne vous  servent à rien. Alors, autant se dire au revoir tout de suite. 
A ces maux déchirants, un seul et unique remède est possible, c’est celui long et trainant du Blues du sud. Celui des histoires tristes à mourir et implorant le bon docteur, censé soigner à coup de bistouris un cœur mariné dans un bocal de bourbon. 
L’appel au secours en question était « Dear Doctor ». 
Le registre de l’harmonica trainant et du blues rauque continue avec « Parachute woman » restant dans le registre du rock du sud le plus classique. Il faudra attendre « Jig-Saw Puzzle » pour revoir le groupe ressortir de la dépression et se contenter de plus que quelques saillies improvisées de Keith Richards. La batterie se raffermie, le bottleneck arrive, enroué de quelques bruits blancs. La basse souple rebondie pour encadrée cette histoire de paumé absolu, le petit Mick Jagger semblant planer sur la chanson, comme un macaque autiste tentant désespérément de singer le Rubik’s cube Dylanien avec ses pieds. En témoignent ces quelques paroles :

“There's a tramp sittin' on my doorstep, Tryin' to waste his time; With his methylated sandwich, He's a walking clothesline; And here comes the bishop's daughter, On the other side; She looks a trifle jealous, She's been an outcast all her life”

Le moment venu est venu de pousser un cocorico avec une chanson directement inspirée aux Stones par note Danny Cohn Bendit national. « Street Fighting Man » a été en effet inspirée par les évènements de Mai 68 par un Mick Jagger littéralement sidéré par le spectacle de rue vivant livré par la  police anti émeutes et des étudiant se coursant à tour de rôle dans le quartier latin. 
En a résulté cette grande chanson, agressant l’auditeur avec une attaque de guitare distordue digne d’un pavé volant s’écrasant sur le coin de votre tronche. Le rythme martial de la batterie rappelle lui les bâtons en caoutchouc battant sur les boucliers des flics quelques minutes avant le choc. 
La piste suivante « Prodigal Son » est elle tout à fait logique, voire banale, très basse, se contentant de singer, (certes, une fois de plus me direz vous) le vieux blues du Delta. « Stray Cat Blues » remet quand à elle au centre du disque un élément clef de la grande mythologie stonienne : celle des groupies dévouées corps et âme à leur super groupe de bad boys. De vraies chattes sauvages hurlantes, griffant allègrement le dos du petit Mick, pauvre petite souris à bouclette avides de stupre et de luxure, perdue entre les pattes de ces panthères au charme félin.

On quitte ensuite le territoire de la chambre à coucher, pour celui de l’usine. Une chanson ou peuvent s’exprimer les percussions indiennes et africaines de Charlie Watts qui s’ennuyait alors à mourir derrière les futs et teste toutes les choses possibles. Sont ajoutés au mix violons européens et harpe chinoise bizarre. « Factory Girl » est une sorte de gigue dédiée au melting pot musical post moderne (nous sommes alors en 1968, ne l’oublions pas, l’année de toutes les utopies). 
Cependant, avouons –le, cet album grandiose ne pouvait pas se terminer de la sorte. La copie acharnée et bâclée du style country-bluegrass livré tout au long de l’album aurait été incomplète sans une grande chanson chorale. Le forfait complet, avec breaks de batterie prévisible à deux cent miles à vol d’oiseau, piano de saloon, chœurs féminins ponctués par des gimmicks de guitares.
Ce monument sera dédié aux foules laborieuses, simples, silencieuses et discrètes, aux paysans et autres pouilleux du bayou, à la peau recouverte de tiques et au front perlant de sueur et tanné par le soleil, le sel de la terre (« Salt Of the Earth ») selon la Bible et Hattie Howard. Les mortels, les autres, les humains, les simples, ceux qui ont gagné leur place au paradis, pour les bonnes et les mauvaises raisons. Je leur dédie humblement ce 100eme billet.

dimanche 13 février 2011

Walk like an Egyptian

Bon, alors ça y est. Les copains égyptiens ont fait le boulot. Well done guys. Vous nous avez donné au monde une leçon ainsi qu'un bon spectacle bien rock and roll.  Tout ceci avec la mythologie révolutionnaire qui va avec : grosses bastons, caillassages en règle des fourgonnettes blindées, volutes épaisses de lacrymogènes, concours de T shirts mouillés avec des véhicules lance à eau, F-16 en rase mottes, cocktails Molotov, foule debout sur les bagnoles, V de la victoire derrière les barricades, scènes de liesses de grandes grappes humaines agrippées aux T 84 aux teintes de scarabées des sables.

On aura même vu des fleurs et des bougies à la con, style révolution de velours. On a même eu le droit à du hardcore rioting couleur locale avec des agitateurs à dos de chameau, fonçant dans la foule à coups de bâton, ambiance bataille des pyramides.
Il ne manquait que les fiers mamelouks et leurs cimeterres. 
Je ne vous cache pas non plus que (cerise sur le gâteau) les journalistes et autres observateurs sont tombés à cours de noms de fleurs à la con à donner à ce grand soulèvement populaire. Ce qui ne gâche rien à la fête.
Du grand spectacle les mecs, bravo à vous. C’est votre instant, profitez en bien, vous avez bien mérité ces quelques trop rares instant de joie et d’espérance, d’enthousiasme collectif aussi pur qu'irraisonné.

Que notre cher lecteur prenne ces biens modestes écrits avec recul et dérision. Point de condescendance de ma part, ni de réjouissances fraternelles à peu de frais. Pour quelles raisons me direz-vous ?

Premièrement parce que n’est pas Bernard Henri Levy qui veut et deuxièmement, l’auteur de ces mots est bien conscient que la seule scène de liesse populaire qu'il a réellement vécu à été par un soir chaud de juillet 1998 la victoire de la France pendant la coupe du monde de football. Une expérience qui permet un certain relativisme, vous en conviendrez.

Dévorez donc ce moment mes amis. Rêvez un peu avant de vous faire claquer le beignet ou de vous faire ôter le baklava de la bouche par le premier militaire de passage ou le premier frère musulman revenu de son exil. Ne laissez personne vous ôter ces instants merveilleux, gardez ces morceaux de béton agglomérés tachés de sang. 
Vous les revendrez à prix d’or aux touristes gras et écarlates, abrutis par le soleil, beats d’admiration, vous demanderont comment c’était, le sourire en coin et la lèvre tombante, l’œil avide. 
Et ce vendeur de souvenirs racontera encore et encore son histoire. Les rideaux des commerces tirés, les rumeurs, les grandes bousculades et l’odeur rance de la sueur, celle métallique du sang dans la bouche. Tous ces détails qui font les petites et les grandes histoires sont fugaces et précieux. Je vous laisserais donc en compagnie de mots bien plus importants que les miens, ceux du romancier Pierre Clostermann, quelqu’un qui a connu le combat, la peur et l’oubli des choses:

 « Le grand cirque est parti. Le public a été satisfait. Le programme était assez chargé, les acteurs pas trop mauvais, et les lions ont dévoré le dompteur.

On en reparlera en famille quelques jours encore.
Et même quand tout sera oublié - la fanfare, le feu d’artifice et les beaux uniformes -, sur la place du village subsistera encore l’auréole de sciure de la piste et les trous des piquets.
La pluie et l’oubli en effaceront vite les traces. »


Bonne soirée à tous.

mercredi 29 décembre 2010

Quatre anglais en K-Way

Pas évident d’écrire à son aise ces derniers temps, et je m’en excuse auprès de vous, rares lecteurs de ce vague radeau moribond. Les putes, l'excès de chair et mon skyblog passion consacré à la Wehrmarcht m'ont considérabl Le boulot qui me prend pas mal de temps, les projets à coté, le permis de conduire, et toutes ces choses prenantes m’ont tenue éloigné de vous. On va donc parler de choses compliquées, difficiles, de combat véritables combats quotidiens à mener.

Les choses n’étaient pas simples non plus pour les rockers anglais du début des nineties. Il en fallait une bonne dose de courage pour tenter de se mesurer à 40 ans de passif local à la fois génial et révéré. Il en fallait des louchées de sueur pour tenter de damer le pion à Oasis, un rival aussi stupide qu’encombrant par sa verve démoniaque et elle aussi toute british.
Cerise sur le gâteau, le mal être, dernier refuge des désespérés venait d’être tiré des cendres encore tièdes de Joy Division par une bande d’américains aussi chevelus et crasseux que géniaux : Nirvana.

Damon Albarn savait que son petit groupe devait la jouer fine et que Blur devait frapper fort une bonne fois pour toute : un album et dedans un hit qui devait conquérir l’Angleterre toute entière de pubs en stades, de school shuttles en tube stations. Ces quatre jeunes devaient opérer le grand syncrétisme, la grande synthèse pour fédérer et enfin exploser. Pour reconquérir les juke-boxes de leur Essex natal et aller chatouiller ceux de Manchester en mettant au passage les tempétueux frères Gallagher à l’amende.
Les dosages sont simples : une base de Velvet Underground mais livrée comme si les Kinks auraient repris du Iggy Pop. Ajouter à cela un accent à la David Bowie, des harmonies vocales piquées aux Beatles et vous obtenez « Blur » l’offensive rock la plus marquante de 1997.

On entame l’ouvrage fort avec le hit N°1 de l’album « Beetlebum » et son riff mélancolique et paresseux, aussi flou que le groupe-lui-même. Soudain, après une minute d’écoute, la pépite arrive, ces grands couplets d’harmonies vocales volées aux Beatles eux-mêmes qui disparaissent avant de revenir, fugace, comme le souvenir de votre premier baiser. 
Doux et amère comme le souvenir de cette peau devenue inaccessible à jamais. 
La nostalgie à portée du jeune urbain encapsulée dans une seule chanson. Le clou est enfoncé plus loin avec « Song 2 » qui est avant tout une super chanson rock avant (aïe) d’être entonnée en soirée par une bande de bourrés (malaise) bas de plafond. La fuzz est de sortie, Albarn et Coxon sont allés la piquer dans la tombe de Bolan avant de la poser sur une batterie aussi musclée qu’entêtante.
« Country Sad Ballad Man » prend le contrepied total de cette énergie et livre une ballade folk piquante et distordue ponctuée de grandes échardes de guitares et de petits effets sonores électroniques croquignolets.
Bizarrement, l’énergie pure reprend sur « M.O.R » comme si le groupe ne pouvait se retenir de jouer piano. Une montée de guitare et de batterie bâtissant un punctum de pression relâchée comme une catapulte projetant le son dans une mer de fuzz et de charleys à laquelle Dinosaur Jr ou The Jesus and Mary Chain nous avait déjà bien habitué avant que nos amis se noient dedans.

La chanson suivante est bien plus relax. Il s’agit d’une petite fresquette si réaliste qu’elle sera officiellement prise comme hymne de la Britpop. L’auditeur attentif saura se passer de ce genre de considération et il appréciera « On Your Own » pour ses chœurs et ses voix en canon répondant les unes aux autres. 
Décidément, les Beatles ont bel et bien fait des émules. « Theme From Retro » est une expérimentation un peu flippante que l’on croirait tout droit tirée d’un Luna Park abandonnée de Blackpool. Ces orgamonds entêtants évoquent une salle de jeux hantée par une horde de clowns morts (on pourra les entendre distinctement à la fin de la chanson). Si le rétro badant était visé, c’est bel et bien réussi.
La chanson suivant est chère au cœur de votre serviteur, car elle a constitué ma porte d’entrée à cet album (en savoir plus sur cette théorie fumeuse ici). Cette petite mélodie croisant guitare sèche et électrique, est la parfaite chronique de la dépression quotidienne. Rarement ces moments de fin de soirée ont été mieux évoqués.
Le morceau suivant fait lui aussi partie de la série d’expérimentations entamées par le groupe sur ce disque. « Death of a Party » raconte très bien cette minute où la musique s’éteint pour laisser les convives éparpillés dans l’appartement sombrer dans un sommeil comateux. Cet orgue tremblant c’est la radio qui grésille encore, ce robinet qui goutte, cette fille éméchée et poisseuse de whisky coca qui vous ronfle dessus.

Le combo renoue pile après avec une énergie folle sur « Chinese Bombs » où la fuzz hurle encore et résonne comme l’écho d’un réacteur de Mig rugissant  dans une passe de l’Himalaya avant de blaster un monastère tibétain.
Le rythme ralentit pour laisser la rythmique de Alex James et Dave Rowntree prendre le contrôle à grands coups de ride fainéante et de basse groovy qui, a vrai dire,  nous perd un peu en route. C’était  « I’m Just a Killer for your love ».  
La chanson venant juste après est « Look Inside America » et autant dire que le groupe reprend du poil grâce à l’excellent songwriting de Damon Albarn qui dépeint avec simplicité la vie ennuyeuse et pétrie d’obligations d’une tournée américaine. Un point de vue rare sortant de la trilogie dope-alcool-déconne (voire filles). Le tout porté par une mélodie et des arrangements des plus classieux.
Le son n’en cesse plus de monter et de durcir. Les guitares et claviers se décomplexent sur le remuant « Movin’On ».
L’album se clôt sur un interlude expérimental de plus « Essex Dogs ». Une piste laissant une fois de plus libre cours aux méditations mélancoliques et leur lot de souvenirs confus.

C’était donc cela Blur. Un opus alternant pistes courtes et nerveuses de power pop-rock terminales et de longues plages d’expérimentations sonores.
C’est cela que Blur a réussi à accomplir par sa musique. Remettre vitesse et énergie au centre de l’équation, se défaire des oripeaux inutiles tout en montant le son encore un peu plus. Quelque chose capable de vous faire danser. Verglas ou non.

dimanche 3 octobre 2010

De l'autre coté de la grande muraille

Il y a des endroits où jouer de la guitare en chantant ce que l’on pense est dangereux.
Dans ce genre de pays, chanter des textes sortant du politiquement correct ne vous mènera qu’à une chose : faire parvenir à vos parents par lettre recommandée une facture de 20 yuans. Une somme correspondant au prix (taxes comprises) de la balle de 9mm parabellum logée dans votre nuque par les soins d’un fonctionnaire pénitentiaire.
Avec les compliments du comité central du parti communiste de Chine populaire.

Les Carsick Cars (un nom qui est un paradoxe en soi) prennent ce risque et se font discrets dans les médias francophones. Peut-être parce que les textes chantés, sont incompréhensibles à moins de posséder de solides notions de Mandarin. Un désavantage pour une culture qui a toujours dans son cœur placé les mots avant la musique. Mais une partie de la beauté du travail des Carsick Cars se trouve ici. Elle nous pousse à nous rappeler l’époque candide et bénie où l’on ne comprenait rien aux paroles affligeantes des Beatles (au moins pour le début de leur carrière, avouez-le).

La visite Pékinoise commence avec « Zhi Yuan De Ren - 志愿的人». Le morceau démarre comme une Geely hors d’âge. L’arbre à came frappe sur la basse et la seconde s’enclenche, ce vent, c’est celui qui siffle par les fenêtres entrouvertes et vous balaye les cheveux. Zhang Shouwang vous parle de sa ville et vous raconte ces grands immeubles et ces jeunes qui fument des cigarettes à la sortie de l’école en vous dévisageant.
Après cette mise en bouche très américaine, cloches et carillons reviennent. Les palais d’or de l’Asie éternelle entrouvrent leurs portes, renfermant leur lot de secrets et d’horreurs sur Zhang et Li Quing (la sorcière  des cloches, oui ce n’est pas un homme). Sur « Gun - 棍 »  ce n’est pas l’opium de Pou Yi le dernier empereur que l’on fume, mais bien de la coke dangereuse que les jeunes sniffent sur des tables en bois rouge laquée. C’est la descente, cette grande plage noise, c’est la peur, qui borde cette lente descente aux enfers.

La chanson suivante  «Zhong Nan Hai 中南海 » est le hit de cet album. La basse semble rouler comme celle des débuts de Joy Division et la guitare gratouille un petit riff que l’on jurerait piqué à Sonic Youth. On dérivera ensuite dans une plage de noise et de reverb complètement maitrisée est ahurissante de finesse et d’harmonies. Cet éther sonique vous laisse abasourdi après avoir dégoupillé vous-même la grenade chinoise. La mélodie revient ensuite et se reforme alors qu’ encore hébété, vous vous relevez des pavés de la place Tiananmen le visage collant de sang pour vous relancer en courant  vers ce Zhong nan hai, cette partie de la cité interdite d’où dirige le tout puissant parti.
Le ton s’apaise et s’allège sur le titre suivant sur «Hou Dao - 厚道 ». Les musiciens cabotinent, la basse s’arrondie et Zhang se relâche, se permettant des vocalises alors inédites sur cet album. On est bien là, à siroter notre Tsing Tao sous les grands platanes des quartiers résidentiels.

« Xiong Mao - 熊猫 » est une chanson comme on les aime. Une voix trainante, celle de Zhang, qui sonne nostalgique er rêveuse, comme absente. Li chante dernière les nappes de guitares, comme les deux Kims l’on fait en leur temps (Gordon et Deal). La section rythmique complétée par Lei Weisi fonctionne superbement bien.
Pour preuve, le véritable wall of sound hallucinant et vertigineux présent sur la piste suivante. On ne sait plus si l’on écoute les enfants des amours des Ramones, de Jesus and Mary Chain et de Dinosaur Jr ou juste une resucée punk minimaliste des Who, mais une chose est certaine « Guang Chang - 广场 » met le son chinois sur la carte du rock mondial. Ces vagues, ce rythme alterné de batterie est proprement incroyable. Puis la voix de Zhang, plaintive et cassée, qui sonne comme celle d'un Viêt-Cong blessé pris dans les barbelés de l’ambassade américaine le soir de l’offensive du Têt… Cette complainte, cette voix trainante et écorchée, est aussi moche que touchante.

La batterie de Li ouvre « Re Shen - 热身 » un des morceaux chantés en anglais sur l’album. Une chanson sur des gens qui ne se parlent pas, qui s’ignorent et ne disent rien. Sur l’inhumanité de la fourmilière. Cette analyse se poursuit sur un deuxième pendant le la réflexion  « He Sheng - 和声 ». Tous ces gens qui marchent dans le rue, leurs rêvent se perdant dans le fracas des machines sur lesquelles ils travaillent à longueur de Journée. La seule fuite possible, la seule issue face à cette routine, c’est de devenir, à l’instar de Johnny un rock and roll hero. Il faudra attendre faire nos adieux à nos amis pékinois sur « Hui Shou - 回授 » au tempo ralenti et à l’ambiance éthérée et aux sonorités de cordes chinoises. On est triste de partir, à contrecœur. Les valises bourrées de faux polos Lacostes et les tympans pleins de ce son de transistor écrasé. Cette bouillie de puce électronique agressive, aigue et rugueuse qui est celle de la ville, qui est la notre.

C’est cela Carsick Cars, des jeunes qui aiment et qui souffrent, à mille lieux des pluies de roses et des lendemains qui chantent. C’est le quotidien au cœur d’une ville de béton tentaculaire, ceinturée par 7 périphériques, au soleil masqué par des nuages de pollution marrons et aspergée par des pluies acides qui ravagent jusqu’à votre selle de vélo.

Loin de la masse impersonnelle et silencieuse, des jeunes mènent le changement et rompent avec le masque de cire d’une société forcenée de travail et cosmopolite s’étirant de Pékin à Canton. Loin de la clinquante image d’une génération ambitieuse, avide et sans morale ni scrupules.

C’est ce tour de force que les Carsick Cars sont en passe de réaliser : nous faire embrasser la beauté et la fragilité des multitudes.