mardi 15 septembre 2009

Fucking and punching

Passons directement s'il vous plaît sur le non-événement de la énième séparation du groupe Oasis.
Une douleur que les frères Gallagher cesseront d'infliger à leurs fans, dès que leur pécule aura été transformé en pintes de lager anglaise (faiblement maltée), descendues le coude nonchalamment appuyé sur le bar de bois vernis et ciré d'un pub, lustré par des générations de gros hommes rougeots et quasi-chauves.
Un de mes amis, Claude pour être précis a développé à l'égard de cet album une théorie intéressante.
C'est ce que l'on appelle un album de réconciliation. C'est le seul capable de vous faire changer d'avis sur cette bande de lads en goguette.

Un pur ramassis de hooligans violents, imbus d'eux même, mégalomanes et monomaniaques, bagarreurs et fondamentalement anti-français.
Mes amis, c'est vous dire la qualité de la pièce que nous avons sous les yeux. Un album récent, mais remuant ce qu'il faut d'énergie et de grandiloquence naturelle vulgaire pour qu'elle puisse faire effet. Il faut dire que 2002 était pour le groupe une époque bénie où les tensions semblaient enfin apaisées entres des membres maintenant matures et calmes...
Force est de constater que l'effort démarre en trombe, comme une Austin Mini surgonflée, désireuse d'avaler le plus de route possible, et, pourquoi pas, celles du monde entier.
Les premières minutes de l'album ne nous contrediront certainement pas sur ce point. "Hindu Time", Un orgue sali et des guitares déviantes saisissent d'entrée l'auditeur, la voix du chanteur enrouée et fainéante fait quelque chose que beaucoup de gens avaient oublier : oser.
Oser tout, faire honteusement rimer "soul" et "rock'n'roll", parler de drogues, se laisser porter par des guitares. Cette ballade spirituelle et plane renoue enfin avec une grande tradition anglaise révérée par les frères Gallagher, ces fils d'irlandais composée des Who, des Beatles et autres Kinks.
Faites, vos valises le fucking rock and roll shebang repart, à fond la caisse.
Le complexe bordel s'efface et les sentiments les plus primaires reviennent, colère, haine et excitation pure, l'ADN de l'Homo Erectus se réassemble pour injecter des doses de testostérone comme "Force of Nature". Le surhomme de Nietszche réapparait, cristallisant sur fond de guitare énervées, couinantes et maltraitées. Noel règle ses comptes avec les groupies et profiteurs de tout poils, qui lui fument son herbe et lui piquent son blé, sans se faire trop de mouron.
Le western moderne des années 2000, c'est bel et bien Oasis, compacte et carré qui nous le donne avec "Hung In a Bad Place".
Un larsen brise le silence, laissant place à une cavalcade de Mustang. On imagine facilement les frères desperados dans le bon la brute et le truant, sautillants sur la pierre tombale du magot, une cravate de chanvre autour du cou, les yeux brulés par le soleils et les lèvres marron en lambeaux.
Le nord de l'Angleterre devient celui du Mexique et la tamise prend des goûts de Rio Grande.
Ces forfanteries prennent (momentanément) fin avec une chanson apaisante, pur moment de gentillesse et de consolation, ce qui est véritablement rare de la part de nos larrons. "Stop Crying your heart Out" et ses violons fait soudainement de vous le héros tendre et sincère d'une teen comedy américaine. Notre rêve à tous. Ces monstres auraient-ils in cœur ?
C'est d'ailleurs ce que beaucoup de personnes on reproché à cet album, être un mélange de guimauve facile et de flons flons un rien rentre dedans.
Pas démontés pour deux sous, les deux frères réitèrent le coup de la tartine à la fraise avec "Songbird", dont ont jurerait une reprise des Beatles new age. Les guitares acoustiques, pianos et tambourins se dépoussièrent, et on jurerait entendre le talon de Mac Cartney battre la mesure sur le linoléum d'Abbey Road.
Ils faut dire que les Gallagher on un certain dont pour les formules pleines de morgues, si solanelles qu'on les prendrait pour les auteurs des premiers mots de la constitution américaine. "Little By Little" n'est pas qu'une ôde à la fratrie virile. Il faut entendre la guitare crier aux alentours de 3 minutes 30, et les accords tout droits sortis d' "Heroin", s'éffançant dans le silence pour comprendre la mission druidique de ces payens modernes.
"A Quick Peep" se rapproche quand à elle des petites saillies studios de l'univers 60s et 70s, le petit son d'orgue sonnant comme celui de Deep Purple en est la preuve.
Le groupe reste fidèle envers ses influences, avec des harmonies de voix éhontément piquées aux grand Fab Four. "Probably All In The Mind" tente juste de se demarquer par des solos de guitares, interminables se tordant dans les infinis dyonisiens qui transparaissent dans cet album.
On jurerarais "She Is Love" une trouvaille de titre du Brian Jonestown Massacre. La similitude ne s'arrète pas là, les parties de guitares folk, d'orgues et de tambourins se chargeront de vous en convaincre. Enfin la nouveauté, que de temps parcouru depuis 1995, année autour de la quelle a été touillé pour la première fois sur la côte west des états unis. La musique ne voyage donc pas vraiment à la vitesse su son (ohoh, quel bon mot).
L'album se termine par la plage la plus longue de tout l'album où ces deux blaireaux s'escriment à nous expliquer sans trop de conviction, ni de talent, qui'ls sont nés sur un nuage diffrent. Les choeurs sont vrailent faibles, pour une production de cette envergure, la seule touche un peu décevante sur l'album, dommage qu'il se finissent là dessus, avec des crins crins en bonus.

Mais voyez-vous, je pense qu'il l'ont remarqué, ce petit foirage de fin. C'est peut-être la raison pour laquelle ils ont recommencé à se foutre sur la gueule dès la tournée consécutive à l'album.
Tiens, comme, comme c'est étrange...comme... maintenant en fait.
Certaines choses ne changent jamais, d'aucuns diront que c'est réconfortant, et les autres (dont énormément de festivaliers) que c'est juste super chiant.



vendredi 4 septembre 2009

Traine - savates

Pourquoi personne ne m’a jamais parlé plus tôt du mouvement shoegaze ?

Pourquoi mes amis fins connaisseurs, mélomanes de goût et autres musiciens de talent (n’est-ce pas à ses amis que l’on mesure la carrure d’un homme ? *hum hum éclaircissement de voix*) on-t-ils gardés pour eux cette pépite ?

Alors oui, certes, j’en avais entendu parler distraitement au détour d’une conversation, plus attiré par les sourires des filles et le fond de mon verre.

Certes encore, on subodore des choses, des fragments adjacents parmi d’autres discographies.

Des reverbs du Velvet, des plages noise de Sonic Youth, des échos des Pixies…

Puis finalement, dans certains magazines rock, on croise du regard quelques clichés comme autant de théâtres trompeurs et grossiers des apparences.

Ces jeunes au regard perplexe et quasi-absent, aussi bien habillées que des teuffeurs de province en guenilles, n’ont pas retenu plus de quelques secondes de mon attention (c’est mon côté Mauriac un peu réac’ que les filles adorent).

Bref, on s’était planté, mon cerveau et moi, par paresse crasse et fainéantise obtus, notre lot à tous. C’est mon devoir d’homme éclairé que de le combattre, même par le biais de cette tribune plus que confidentielle.


Mon passeport pour la rédemption intellectuelle sera l'album "Loveless", du groupe irlandais My Bloody Valentine. Un groupe moderne, pratiquant la parité avant nos chères lois républicaines (Bilinda Butcher et Debbie Googe aux basses et guitares et Kevin Shields aidé de Colm O' Ciosoig [ wtf ?] aux guitares et batteries).

La raison de ce choix est simple, cet album est sensé être la toute première base du mouvement shoegaze, un de ces blocs de granit ou de calcaire que l'on soit napoléonien ou egyptologue. Notre pinceau d'archéologue en main, nous pouvons nous pencher avec l'excitation intellectuelle du philatéliste sur cette gemme des fort décriées fin des années 1980.

L'album commence par le morceau le plus pop et grand public que le groupe ait réussi à produire sur ce gros gâteau d'échos, de saturation et de reverb. "Only Shallow" attaque fort, avec une guitare réglée par un cinglé, qui sonne comme des hurlements de Vélociraptor.

La voix féminine, pure magnificence éthérée et aérienne mixée en arrière contraste totalement avec le reste des instruments.

Dès l'écoute de la première chanson, on se rend compte que ce groupe d'extrémiste irlandais (un peu comme l'IRA) a l'ambition de dynamiter les conventions et de déstructurer les acquis d'une scène rock alors un peu endormie. Et cela marche. La provocation continue avec "Loomer", morceau déconstruit, tournant en boucle, toutes guitares retenues, attendant d'exploser, obsédantes. Un clavier dégueulasse porte avec lui les derniers oripeaux d'une New Wave mourante. Même le songwriting n'importe plus vraiment.

Les paroles, d'ailleurs s'envolent, sur "Touched" comme emportées par le vent comme des feuilles mortes, disparues, balayées par un clavier, des reverbs et échos de guitares inquiétantes, quasiment immortelles. Retenez bien ce son recouvrant absolument tout. Il étaye une de mes théories fumeuses : My Bloody Valentine est le dernier rejeton de la New Wave nordique.

Il s'agit pour s'en convaincre de prêter l'oreille à la chanson suivante "To Here Knows When".

Ce son qui paraît samplé, entêtant est tout simplement une marque évidente de la new wave tardive du milieu des années 80. Il suffira d'écouter "O Pamela" et "Gruesome Castle", deux bijoux du groupe Écossais aussi talentueux que méconnu The Wake. La ressemblance est flagrante, l'Irlande et l'Ecosse étant séparées par un petit bras de mer. Ces voix sous mixées et ses claviers éthérés attestent de la présence d'une même couche sédimentaire primitive, celle de la New Wave. Une chose qui va disparaitre après quelques accords américain bien bendés.

Ce son subsiste sur la chanson suivante "When You Sleep", qui vous propulse droit dans le futur, un refrain que l'on donnerait pour du Pixies. Une guitare dont la vigueur et le son donnent l'impression que ces notes ont le pouvoir de briser les rêves comme de simples bulles de savon. Les chorales de chanteurs se fondent et se mélangent comme une fête de fantômes vaporeux à la Hacienda de Manchester, avec le défunt Ian Curtis aux platines.

"I Only Said" et ses vagues de décibels parlent d'un ciel rouge, sous lequel on vit, peut-être celui de la jaquette? On ne sait plus si on entend véritablement un harmonica ou si l'on a tout simplement rêvé, la tête posée contre le réacteur n°4 de Technorbyl, avant que notre vision ne se brouille à jamais. Chaleur et lumière des atomes en fusions.


Sur "Come In Alone" on se rend compte que le son des Valentines n'est pas un hasardeux bidouillage mais d'une modulation habile de leurs guitares, qu'ils parviennent à faire sonner comme un baleine mourante (décidément, c'est le jour des métaphores animales).

Ces différentes tonalités leur permettant de brosser toutes sortes de palettes d'émotions.

Ce dont ils ne se privent pas de faire sur "Sometimes", où, groupe féministe oblige, Kevin peut enfin se tailler la part du lion au micro. Le résultat est à la hauteur de celui des demoiselles. Cette chanson nous donne aussi à voir que les thèmes New Wave, solitude, futurisme, poésie et amour en perpétuelle fuite n'ont pas changé.

La chanson suivante, confirme cette orientation, "Blown A WIsh" parle de mort certaine et d'attente, de promesses sur les coups de minuit. A cette heure si étrange ou tout paraît différent. On se laissera impressioner par la discretion de la batterie, laissant toute la place necessaire aux harmonies voix-guitares, la grande spécialité du groupe.

"What You Want" quant à lui a carrément des faux airs de "Teenage Riot" de Sonic Youth. On imagine sans peine à cette époque, à quelle saine émulation ont pu réagir les deux groupes.

L'album se clot sur "Soon" qui envoie la dernière dose d'énergie vitale, sa batterie affirmée, et Bilinda qui surfe sur les dernières saillies de guitares qui paraissent aussi coupantes que rugueuses, clouant sur place la voix trainante qui semble à présent s'étaler comme la traine d'une comète mourante.


Oui, cet album est la preuve de plusieurs choses. La première est que les groupes irlandais ont toujours sû cultiver une différence précieuse avec l'encombrant voisin anglais (des Undertones à U2, des périodes de ce dernier groupe demeurant à peu près valables si vous n'êtes pas un gros hipster de votre race). La seconde est la preuve que le vacarme des guitares saturées peut se permettre d'être majestueux, comme la mer ou un orage d'été. Ceci, en soi, est une grande leçon.

Alors après tout, bon, post-New Wave ou Shoegazing, qu'est-ce qu'on en a à faire?


Voilà, la faute est réparée.