Parceque nous sommes tous des névrosés monomaniaques polymorphes bornés, si je vous jure, je vais vous parler encore une fois de plus de mes chouchoutes de la côte ouest, oui, encore et toujours les indécrotables Donnas.
Vous commencez à en avoir l'habitude, je chronique de manière tordue les albums qui ont eu le malheur d'échoir entre mes mains (non pas tous non plus, mais quelques uns).
Certains de ceux ci sont beaux, étonnants, originaux, surprenants, puissants, dérangeants, fondateurs, appliqués voire des fois totalement fucked up.
On oublie trop souvent les albums à valeur de documents historiques, dénués de toute prétention harmonique et de concept global tenant la route, en faisant une oeuvre d'art spontané totale, un instantané sans chichis.
Quand j'évoque cette catégorie, mon interlocuteur me répondra benoitement:
"Bah et les lives alors?".
Il aura alors raison, mais en parcourant les plus grands lives de tous les temps le mélomane s'apercevra de deux choses: dans un premier cas les lives proposant la meilleure performance d'atiste et la meilleure qualité d'écoute sont dans la plupart des cas remasterisés, remixés, voire purement et simplement réenregistrés (le très bon "Live At Leeds" des Who qui n'en est pas un).
Dans le deuxième cas, les prises ont été murement préparées, la meilleure salle choisie et les musiciens brieffés et appliqués.
Là la notion de document historique perd tout son sens, n'étant plus un instantané retranscrivant fidèlement un moment, un lieu, un événement.
Imaginez une seconde un cadreur américain brieffant un pilote de zéro japonais pile avant Pearl Harbor :
"Bon alors là Nakamura tu nous fais d'abord un beau passage à basse altitude en règle, un demi tonneau renversé à droite, deux passes de mitraillages sur le cuirassier Arizona, tu remontes à 2000 pieds et tu balance ta bombe en plein sur un reservoir d'essence du port et tu repars en trombe, all right?".
Alors qu'en vrai je pauvre mec se pointe, balance sa bombe à toute allure et se barre avant qu'une escadre entière de P 40 lui tombe dessus.
Là c'est un document historique, c'est ce qui se passe en vrai, c'est le cas de cet album.
Putain ce parrèlle dogfight = concert de rock me plait vachement, tout est là, quand les types jouent leur vie dans la seconde, oui ou fuck.
Trève de digressions passionées, revenons à nos copines californiennes avec un petit retour dans le temps (je me permet la bio parce que c'est un groupe peu connu en France et cela n'a jamais été fait auparavant, eh oui il y a ce moine copiste grégorien qui someille en moi).
Tout commence pour elles lors d'un banal concert organisé par les profs à l'heure du lunch, les gosses du lycée d'embarcadero road n'en reviennent pas: quatre freaks féminines improbables grimpent sur la scène et attaquent bille en tête une cover d'un titre des très confidentiels Shonen Knives (un power trio japonais féminin).
Leur inéxperience n'a d'égal que l'energie délivrée sur scène et les pires rumeurs se mettent à courrir sur ces asociales de première catégorie: elles seraient gouines, sous crack, héroine, cocaine, des satanistes, et Ozzy Osborne serait le père de la bassiste...diantre.
L'affaire est bien partie, et après avoir écumé quelques clubs elle arrive aux oreilles d'un producteur-manager-songwriter à mi temps et accessoirement disc jockey de radio X, une radio indé de Stanford, Darren Raffaelli (d'ailleurs mort recemment).
Très vite, des premiers EP estampillées Super Teem! sortent et échouent dans les bureaux du mythique label Loukout ! records qui a signé les premières sensations pop punk de la baie de SF, parmi eux des pointures comme Green Day, Rancid, the Eyeliners et la plus anecdotique Mr. T Experience.
L'album "the Donnas" est le fruit des séances d'enregistrement des premiers EP et du début et de leur collaboration avec Loukoot! d'où le coté fourre tout et assemblage sauvage de ce dique composé d'en tout 23 chansons (la plus courte 1:10) montrant au début les séances studio et à la fin des lives à la qualité sonique capable de pousser au suicide les plus audiophiles d'entre vous.
Car oui, manque de temps, d'argent, d'experience vont réduire le potentiel musical de cet album.
Même si la prise de son parait bonne,les batteries rondes et chaleureuses de Torry castellano rendent bien, la basse langoureuse de Maya Ford se tient, mais par contre le son de guitare d'Alison Robertson est bourré de reverb (saturant completement les pauvres micros premiers prix et faisant couler tout le mix, n'est pas Phil Spector qui veut) noyant la voix sublimement morveuse de Brett Anderson. Adeptes du raw power vous êtes servi.
Pas la peine de disserter sur toutes les chansons, (ce que je ferais avec plaisir mais j'ai pitié de vous) ces anthems punk Ramones modernes se ressemblent toutes.
Les thèmes chers au Donnas jusqu'à maintenant y sont déjà, ils tiennent en peu de mots, pièces choisies:
- La consommation régulière d'alcool et de drogues douces "Everybody's Smoking Cheeba":
Every son and every daughter's, Growing cheeba in their locker, Gimme gimme, gimme gimme, It's the herb that we must see yeah, Everybody's smoking cheeba
- La fête "Friday Fun":Hey hey, I'm gonna get a Friday, Gonna get a Friday fun
- La haine et le rejet total des autres "I wanna be Unabomber":I hate all the kids at school, They all think that they're so cool, They just like to sit and taunt me, Turn those kids into salami
- L'amour incandescent. "I'm Gonna Make Him Mine"
He's so glitchy, he's so cool, He's the rabbest in the school, When I see him walk our way, My friends all talk and I don't know what to say.
On se fera aussi un plaisir de visionner le clip de "Get Rid of That Girl" totalement kitsch et décalé.
La force supplémentaire me poussant à chroniquer cet album est bien sûr la forte charge emotionnelle evidente et sincère délivrée par le combo.
Cette impression qu'il joue, sa vie sur chaque morceau, bouleversé par chaque chagrin d'amour et implorant les dieux de la fête dans des bratty songs hysteriques.
Le tout baigné dans un parfum de bubblegum trident quasi odieux et le soleil de californie qui cogne.
Vous y etes, vous savez maintenant que grandir en californie n'est pas the OC, guetto de bourges, mais San Mateo, Oakland et San Jose, ce triangle d'or de la baie faisant de vous un sale kid avide de stupre, de luxure et de rock and roll.
Un peu ce que vous êtes déjà, l'académie de Créteil en moins.
jeudi 15 novembre 2007
L' école de Palo Alto
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