Le Velvet underground est le meilleur groupe de l'histoire du rock.
C'est avec ce genre de phrases péremptoires, presque autant que Lou Reed himself que l'on réveille une bande de glandeurs ensuqués par quelques semaines de bombances festives.
Maux de ventres, selles molles,gueules de bois, bourrelets, alka seltzer et tout le toutime.
By the way, ne comptez pas sur moi pour me faire le pourfendeur de cet autel sacrificiel consumériste de fin d'année. Après mon vibrant plaidoyer pour la douchebag nation, cela ferait désordre.
D'ailleurs, que voudraient-ils, tous ces bobos larmoyants, que l'on réveillonne avec des salsifis cuits à l'eau? Que l'on arrête de se ruer dans les magasins et cesser de consommer, et perdre ainsi les quelques emplois qui nous restent, chez les pâtissiers, les commerçants et autres alcooliers internationaux?
Non, non, un peu de bon sens voyons...Trêve de coups d'épées dans l'eau aussi insignifiants que circonstanciés.
Je ne vous ferais pas l'affront de vous rappeler combien ce modeste blog aime, adule et adore cette formation new yorkaise séminale et fondatrice, vous en trouverez les preuves ici et là.
Seuls quelques albums de ce groupe sont encore épargnés par notre furia velvetomanianesque, tort que nous allons combler un peu plus avec ce billet.
Mais pas de panique mes amis, vos oreilles, déformées quotidiennement par de la pop guimauve insipide, de la minimale merdique (car seulement bien quand elle s'écoute bourré et défoncé le tout entourées de nymphes dévêtues) ou de la varietoche qui ne dit pas son nom (genre chanson à texte sous vernis indé) n'ont ici rien à craindre.
Pas de violon torturé, ni de guitare fuzzy. Niet, nada, wallou.
Que du bon commercial.
Mais comment? Mais pourquoi donc? Comment ne pas retrouver la décadence grise et morbide traduite en notes? Comment ne pas dresser la juste et vraie fresque sonore de ce vice urbain quotidien, de cette dépravation habituellement assumée?
Et bien pour la bonne et simple raison qu'en cette bonne année 1970, Lou Reed et John Cale s'embrouillent, clash final. Le violoniste musicologue surdoué et torturé capitule, range son archet, son lutrin et se taille.
Idem pour Maureen Tucker, la batteuse rouquine cultivant soigneusement ses beats d'Homo Erectus se barre aussi, en cloque jusqu'aux yeux. Les fans moyens sont médusés, cette batteuse à la démarche d'ouvrier du BTP, n'était manifestement pas si lesbienne que ça !
C'est donc avec un nouveau line up que Lou Reed arrive en studio, assisté par un nouveau venu, Doug Yule, un musicien enthousiaste content de faire partie du voyage.
Notre Lou se pointe donc détendu, soulagé ne ne plus avoir à faire face aux tensions continuelles l'opposant à Cale. Il se pointe avec dans ses poches, parmi quelques sachets de substances aussi dangereuses qu'illicites de très bonnes et assez anciennes chansons et une ferme envie de chatouiller le Top 50 US (aussi bien pour des raisons de contrats que d'orgueil personnel, des motivations récurrentes chez le personnage).
Le ton de l'album est donné d'entrée de jeu avec "Who Loves The Sun", la voix mélodieuse de Yule se cale parfaitement aux riches chœurs et harmonies vocales qui se déploient en canon. La richesse mélodique et ces entremêlements de voix prennent à contrepied l'auditeur de la rue, voyant ce groupe comme une clique de drogués nihilistes. Ne nous laissons pas tromper par ces merveilles pop, le Velvet n'a pas changé, les petites comptines douces ont toujours fait partie de l'aventure, et ce, dès le tout premier album.
L'album démarre fort, car il ne faudra pas aller plus loin que la deuxième piste pour trouver un véritable hit, "Sweet Jane" repris par tous les groupes dignes de ce nom et mêmes les fanfarons les plus moqueurs à l'instar des Cowboy Junkies et de Starshooter.
La voix granuleuse de Lou Reed, même fragile au moment de l'enregistrement se déploie avec la rondeur et la bonhomie d'un bagel new yorkais.
Que dire alors de la mélodie simpliste, cette ligne de basse affriolante, de ce tempo parfait, portant admirablement un songwriting poussé, poétique. On est là nous aussi, assis au coin du feu, la TSF branchée en compagnie de ces middle classers compassés.
L'introspection profonde continue avec "Rock And Roll", la fameuse rock and roll radio chantée elle aussi plus tard par les Ramones. Cette chanson est largement autobiographique, Lou Reed ayant toujours affirmé qu'il avait découvert la musique via le poste de radio familial, duquel sortaient les airs les plus merveilleux qu'il n'ait jamais entendu. C'est le petit Lou, fan absolu de Bo Diddley qui chante ici.
Le côté laid back et détendu de "Cool It Down", son piano et ses voies overdubées place directement le groupe dans la grande traditions de ces premiers groupes de pionniers rock (et plus particulièrement rockabilly à l'époque). Mr Reed a d'ailleurs confessé depuis qu'il n'a jamais été capable de sortir un blues décent, seulement des tocades rockabilly héritée de son enfance.
"New Age" est un récit doux amer intimiste narrant la rencontre entre une vieille gloire du grand écran et un fan transi. Les chœurs étouffées et les pistes d'harmonium vous réserveront quelques surprises.
Ces belles exécutions, diablement bien livrées ne doivent pas nous faire perdre de vu le fait que le Velvet est avant tout un sacré groupe de rock. Une base inamovible de guitares grattées à l'os et de batterie percutante "Head Held High" tombe à point pour nous le rappeler. Si la voix se fait plus éraillée et cassée, c'est encore des souvenirs d'enfance que le groupe touille et remue.
Les mythes américains ne sont pas épargnés, "Lonesome Cowboy Bill" mêle cowbell groovy et yodel focenné. Les parties de guitares s'égrènent se suspendent, chutent et repartent. Ce n'est plus une chanson, c'est une bagarre de saloon. Le far west existe encore.
Si la chanson en question fleurait le whisky et la graisse à cuir, la suivante est faite d'un tout autre bois. On jurerait que le groupe a piqué des albums aux Beach Boys et aux Beatles, les détroussant de leurs harmonies vocales. Lou reprend le dessus à mi-chanson, en parlant son texte sur une délicate mélodie, comme l'écrivain-chanteur qu'il a toujours souhaité être.
La seule once de dureté dans "I Found A Reason" est cet effleurement de guitare distordue lancinante.
"Train Round The Bend" prend le contrepied total dans un retour aux sources, piano et guitares chuintantes, irritantes et crispantes comme des cigales électriques méridionales. Le genre de son répétitif qui vous transperce les oreilles pour vous percuter le cerveau. Le chant se libère et avec lui sa cascade d'onomatopées primales.
Lou reed a toujours dit lui même que la plupart de ses chansons tenaient sur 3 accords maximum. On jurerait que la chanson suivante a été calquée sur ceux de "New Age".
"Oh! Sweet Nuthin'" pose la même ambiance Jazzy et décontractée, cultivée dès 1965 avec la naissance même du Velvet Underground. Le solo s'étend, comme si le groupe ne voulait pas refermer le chapitre de l'histoire de l'un des groupes les plus influents de l'histoire du rock.
Et puis l'aventure meurt ainsi, avec un soupir posé sur un dernier accord plaqué. Et un Lou Reed qui se voit à présent dactylo dans la boite de son père (véridique).
Car oui, c'est un des traits majeurs de Loaded, une collection de petites madeleines de Proust.
Des balades plus sucrées, taillées pour un format FM. Certaines réussiront en effet à percer. D'autres, (d'aucun diront les plus intéressantes) iront rejoindre les piles d'invendus poussiéreux de Tower Records sur la 5ème. En attendant qu'un touriste s'en saisisse, à 4$ avant la fermeture définitive, comme un souvenir de NY, au même titre que la casquette des Yankees et de la boule à neige de la Statue de la Liberté.
D'autres paieront plein pot pour des éditions augmentées, valant largement le coup, avec leur plein de face B fortes et magnifiques qui essaimeront jusqu'à la période "Berlin".
C'est peut être ça cette fumée rose qui remonte les escaliers, les bribes vaporeuses d'un pays de cocagne que certains ont une dernière fois relaté, avant s'éclipser, pour réapparaitre ailleurs. Les ferments du Lou Reed solo des vingt prochaines années était bien là, cachés dans la bouche de métro.
Faites gaffe la prochaine fois que vous ferez biper votre passe navigo, vous pourriez bien les croiser.
vendredi 1 janvier 2010
Why villains always blink their eyes
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