Les intellos les plus résistants comme Martin Scorsese et Woody Allen étaient là, mais la horde des suiveurs branchouilles, les jeunes businessmen et leurs femmes, qui eux, vont voir les concerts, payent les albums et en parlent à leur amis à fort pouvoir d’achat avaient déguerpis depuis longtemps.Les groupes pros vont les suivre ailleurs, les boites de musique, les salles de concert et les dancings ferment les uns après les autres, faute de public…et de groupes.
Le CBGB, (ex Palace Bar) se cantonnait encore à la country et les ramones étaient encore délinquants juvéniles ou livreurs, et zonaient dans le Queens.
Ce désert culturel et musical va commencer à sérieusement ennuyer certains, et la bande de Johnny Thunders en particulier. Ce ritale new yorkais grand teint se mue en guitar hero, maniant avec un style bravache sa Gibson junior, froissant ses riffs agressifs comme autant de boules de papier revêches et les lançant sans autre forme de procès.
Ce style sec combiné à une vénération des grands anciens va directement amener son groupe a pratiquer un glam’ punk déchaîné (punk n’existe pas à l’époque, il sera collé à posteriori).
Les premières notes boogie de l’excellentissime « Personality Crisis » et les notes de piano saloon nous prouve que la vibration primaire ne vient pas de Londres, mai bel et bien du pays des cow-boys et des indiens. Cette chanson illustre parfaitement la façade outrancière et provocante de ce groupe, se produisant maquillés et habillés comme des travelos de Time Square (endroit qui, avant de devenir la boîte à touriste déprimante de maintenant était à l’époque le royaume des prostituées et des cinémas pornos à 25 cents la séance).
Je dis façade, car, Thunders, bien que junkie notoire fût aussi un catholique pratiquant grâce à une mama italienne possessive.
« Looking For a Kiss » parle bien sûr d’un camé cherchant sa dose dans les rues de New York, la mélodie vintage détournée, pourtant d’un classicisme fou fait penser à un Lou Reed dont les mots auraient pu être les mêmes: ”Listen when I tell ya, you got no time for fix,
Cus I just gotta make it, cant afford to miss, And there's one reason, I'm telling you this
I feels bad....And I'm looking for a kiss”.
L’accent d’un pur new yorker comme David Johansen rajoute encore au réalisme.
« Vietnamese Baby » avec son gong d’entrée majestueux et son rythme noir, martial et désabusé, parle des horreurs vietnamiennes qui touchent à leur fin, que cette jeunesse américaine, malade et brisée ramène avec elle au pays.
Après toute cette angoisse, un petit nuage de douceur et d’amour éthéré chanté à mi voix avec renforts de chœurs, saxophones et guitares sèches vient nous charmer les tympans.
Ce n’est qu’un répit avant que la batterie oppressante de Jerry Nolan et sa bande ne revisitent l’icône populaire « Frankenstein ». Ce Frankenstein humain, est-ce eux ? Cette hydre rock’n’roll travestie et choquante ? Ou vous, malades qui s’ignorent et qui obéissez aveuglement aux ordre de vos créateurs ? Les cris gutturaux de la fin ont probablement la réponse.
La basse bondissante de Athur Killer Kane reprend dans un registre bien plus léger, l’enlevé « Trash », un marivaudage urbain sur fond de choeurs enjôleurs.
On continue dans la bonne humeur avec « Bad Girl » où Jerry tombe amoureux d’une délinquante qui repousse invariablement ses avances.
La recette de double guitare croisées et alternées fait son petit effet sur ce morceau ou tout le groupe rebondi allégrement sur quelques accords.
« Subway Train » lui occupe le rôle typiquement New York Dollien de ballade country trash, traînante, comme si les Stones avaient donnée dans le punk sur Exile on Main Street.
Dans le même registre, avec un tempo plus musclé et un harmonica toutes voiles dehors « Pills » est la chanson de défonce par excellence (As I was lyin in a hospital bed, A rock n roll nurse went into my head, She says, hold ya arm, stick out ya tounge, I gots some pills I'm gonna give you some) soutenue par la guitare en apesanteur de Thunder, touché par la grâce, classique sobre et ample comme un hummer sur les routes irakiennes.
L’avant dernière « Private World » joue la blague opéra glam, mais parait à mon goût un peu surfaite.
L’album se termine sur une apothéose, ma chanson de skate session ultime « Jet Boy », dont le riff simplissime et les handclaps vous collent un jetpack dans le dos et vous envoient dans une quatrième dimension urbaine. Le premier punk, libre, sauvage et farceur, cognant comme une escarmouche de panzer et virevoltant comme oiseau.
Tout le monde allait suivre ce chemin clair et simple, cette voie sacrée qui mènerait au renouveau rock de la grosse pomme, pour au moins dix ans.
Ils se sont reformé, mais rien, rien se sera plus jamais comme avant
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